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Portrait – Pierre Joël, photographe de nu artistique et érotique

Pierre Joël photographe berlin

Pierre Joël et Connard le squelette – Salondetheberlinois.com

J’avais très peur de la mort jusqu’à mes 20 ans, c’était quelque chose qui m’effrayait vraiment. Maintenant, je vis avec un squelette et il dort dans ma chambre, devant mon lit.

Cette semaine, je vous plonge dans l’univers fantasque et fantasmagorique du photographe Pierre Joël, un artiste aux multiples facettes. De l’objectif de son appareil photos naissent des images fascinantes où des corps féminins nus se meuvent dans une beauté esthétique troublante et ambiguë. Sur le pas de sa porte, je découvre un petit atelier très lumineux rempli de miroirs, d’accessoires, de costumes, de dentelles et de masques colorés. Ici, tout est fait de récup’. Je m’assois alors sur un canapé rouge, à côté d’une chaise de gynéco aux lames tranchantes, non loin de „Connard“ le squelette qui me sourit de toute ses dents. Pierre Joël m’accueille avec chaleur, il me sert un verre d’eau, allume une clope et l’interview peut commencer.

Pierre Joël aux mains d’argent

Le Strasbourgeois Pierre Joël est issu d’une famille qui a le voyage dans le sang et il passe 6 ans de son enfance à Madagascar. Ensuite, il poursuit sa scolarité à Strasbourg jusqu’en seconde. S’il a déjà une sensibilité prononcée pour l’art et notamment le cinéma, ses parents le voient d’un autre œil et préfèrent qu’il apprenne un “vrai” métier. La fine mécanique horlogère lui semble alors une bonne alternative car elle se rapproche de son intérêt premier pour les automates, les boîtes à musique, les orgues de barbarie et même la robotique. Ses études en horlogerie lui permettent, en outre, de devenir ambidextre, minutieux et précis, des qualités qui lui servent encore aujourd’hui dans la photo mais aussi dans la décoration de pièces de théâtre. Il enchaîne alors les petits boulots : horloger, machiniste pour une production de cinéma, décorateur dans les théâtres, intermittent du spectacle, auteur réalisateur, journaliste, photographe ou encore régisseur.

femme portrait pierre joel photographe berlin

Photo : Pierre Joël

En 1989, des potes lui proposent d’aller à Berlin pour assister à un événement majeur de l’Histoire : la chute du mur. S’il n’a pas pu s’y rendre, la ville est restée à partir de là gravée dans sa mémoire. Touche à tout et avec 1 000 projets en tête, il finit bien plus tard par s’installer à Berlin où il obtient un job de technicien pour le Berliner Festspiele. Perfectionniste, il démontre alors une grande dextérité et imagination quant à la décoration de scène. C’est aujourd’hui encore son job principal qu’il partage avec sa passion pour la photo de nu artistique.

Sa spécificité ? Aucune photo n’est retouchée via ordinateur, les effets sont réalisés grâce à des accessoires divers et variés. Il joue avec la transparence, les reflets, la lumière et les paillettes : miroirs déformants, verre brisé, voiles transparents, poudre d’or, lampes spéciales, tubes de verre, et tout ce qu’il trouve dans la rue. Les nombreux accessoires et notamment Bruno la pieuvre, mondialement célèbre et que vous apprendrez à mieux connaître au fil de cette interview, font régulièrement leur apparition sur les photos.

Pierre Joel

Pierre Joël – photo : Agnes Fox

L’interview

Quand as-tu commencé à faire de la photo ?

Mon père est un grand fan de photo et quand on était à Madagascar, il faisait tous les développements à la maison. Les soirs où on faisait les tirages, je restais à côté de lui, je regardais comment ça se passait et ça m’intéressait déjà. Quand j’avais 15 ans, j’ai commencé à emprunter son appareil (ndlr : un très bon Nikon) et à faire pas mal de photos souvenir, des photoreportages et des portraits. Ensuite au lycée, j’étais responsable du photoclub.

Avec quel appareil travailles-tu ?

Je continue à travailler avec Nikon : là, je viens d’acheter le premier Nikon Full Frame. Je prends généralement des appareils assez simples. Je n’ai rien en automatique car je suis obligé d’être en manuel pour les photos que je prends.

Pourquoi le nu ?

J’ai commencé le nu il y a à peu près 20 ans. C’était par hasard, j’avais commencé avec des copines. J’avais une manière de montrer les nus totalement différemment de ce qu’on a l’habitude de voir, si bien que plusieurs personnes m’ont dit : “ah, attends, t’arrête pas, c’est vachement intéressant !” Puis j’ai fait des essais et j’ai commencé à avoir des expositions. Les gens s’intéressaient à mon travail. C’est une passion que j’exerce à côté de mon métier, puisqu’il faut bien vivre de quelque chose. Mais j’ai l’espoir que mes projets dans la photo se développent de plus en plus et que je puisse en vivre un jour.

femmes en or pierre joel photographe berlin

Photo : Pierre Joël

La plupart de tes modèles sont des femmes et certaines photos sont très explicites. Comment perçois-tu le corps féminin ?

Le corps de la femme et sa sexualité m’ont toujours attiré et intrigué. C’est peut être lié à des tabous de mon enfance et à des tabous de la société. Des amis m’ont dit que quand on représentait le sexe de la femme dans la peinture, c’était de l’art, alors que dans la photo, c’était tout de suite connoté porno. Je n’étais pas tout à fait d’accord et c’est là que je me suis dit qu’on pouvait aussi le montrer en photo, sans que ce soit vulgaire. J’ai découvert que ce genre d’art était très populaire dans les pays d’Asie. En Inde par exemple, le Yoni qui représente le sexe de la femme est sacré. Il est représenté partout, même dans les temples. Pour moi, le sexe de la femme est un temple sacré, je le trouve tellement beau. Il reste l’origine du monde.

Comment réagissent les femmes qui voient ton travail ? C’est un peu troublant et inhabituel, non ?
Ce n’est jamais vulgaire, même si quelque fois, c’est très explicite. Il y a des femmes qui trouvent mon travail très fascinant et d’autres très perturbant, tout dépend du rapport qu’on a à son corps, de l’éducation, du milieu dans lequel on a grandi. Ça m’arrive de voir une fille dans la rue et de me dire : “tiens, elle serait pas mal en photo, je vais lui parler.” C’est ainsi que deux filles que j’avais croisées dans le métro sont venues à mon atelier. Quand elles voient mon travail et ma renommée, ça les rassure. Bien sûr, tout est une question de respect mutuel entre le photographe et le modèle.

femmes en or pierre joel

Photo : Pierre Joël

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Portrait – Lola de Saint Germain, pin-up et effeuilleuse burlesque

Lola de Saint Germainburlesque Berlin

Lola de St Germain – Salondetheberlinois.com

Shimmy Shake and Strip ! (Danse et déshabille-toi)

Cette semaine, le Salon de Thé berlinois met à l’honneur les femmes au caractère bien trempé et vous plonge dans l’univers froufroutant des strass et des paillettes ! Retenez ce nom : Lola de St Germain. Cette jeune performeuse pleine de peps se produit régulièrement sur la scène berlinoise depuis 3 ans et pratique l’effeuillage burlesque (rien que pour vos yeux !) qui lui permet de s’exprimer en toute sensualité, pasties au bout des seins. Elle est à ce jour la seule effeuilleuse burlesque française sur Berlin.

Être artiste, c’est être paradoxal

Après l’avoir vue performer sur la petite scène intimiste de la Villa Neukölln, subjuguée, je décide de la rencontrer un soir, à Rosenthalerplatz. Nous commençons par un petit shooting photo dans le parc sous les arbres pour finir par boire une limo au salon de thé „Petit Fleury“. Les passants curieux se retournent sur son passage (et prennent même ses escarpins en photos) : avec ses allures de pin-up rétro, ses chaussures à talon vertigineux, son joli minois poudré, ses lèvres rouges et pulpeuses et sa robe style années 50, elle ne passe effectivement pas inaperçu. Je découvre alors au fil de l’interview une jeune fille exubérante, passionnée, cultivée et quadrilingue. Elle semble d’une fragilité à fleur de peau et à la fois d’une grande combativité, elle est un peu femme-enfant, un brin excentrique et totalement imprévisible.

Le parcours de Lola de Saint Germain est assez atypique : depuis toute petite, elle baigne dans le théâtre, la musique, le chant lyrique et la danse classique. Originaire de Paris, elle fait un bac franco-allemand et une prépa littéraire dont elle déplore le conformisme. Mais ces années de prépa sont également révélatrices : elle découvre sa féminité et commence notamment à s’intéresser au burlesque. En troisième année de licence, elle reprend la fac et étudie l’Histoire de l’Art, l’Archéologie et l’Allemand jusqu’au Master. Elle rédige alors son mémoire de fin d’année sur la représentation des femmes dans les cabarets berlinois durant la république de Weimar (1918-1933), ce qui l’a beaucoup influencée par la suite. En parallèle de ses études, ses ambitions journalistiques la poussent à écrire pour plusieurs magazines en ligne, notamment pour le magazine berlinois et anglophone Sensa Nostra où elle s’occupe, entre autres, de la rubrique burlesque.

Lola de Saint Germain burlesque Berlin

L’Améthyste – Crédits photo : Atelieri O. Haapala

Premiers pas de danse à Berlin

Pourquoi Berlin ? Elle connaît la ville depuis l’âge de 15 ans et y séjourne pour la première fois dans le cadre du programme d’échange Voltaire. Si elle y vit aujourd’hui au rythme des minijobs, c’est surtout pour le coût de la vie plus bas qu’à Paris et à Londres, la „Mecque du burlesque“. Elle a commencé à se produire sur scène à Berlin il y a trois ans seulement et se découvre un véritable engouement pour la danse sulfureuse du burlesque traditionnel qui lui permet de se libérer de toutes ses angoisses. „La scène, c’est le seul endroit où je suis moi. La scène, c’est très désinhibant.“ C’est elle qui crée son propre personnage, fabrique ses costumes, réalise ses numéros, ses coiffures et son maquillage. Et tout comme les plus grandes danseuses de burlesque de l’histoire, elle cultive une vie compliquée et tumultueuse, notamment avec les hommes.

La poupée verte

Lola de St Germain compte à son actif 8 numéros burlesques, dont le spectacle très esthétique The Green Doll qu’elle perfectionne à chaque apparition. Ce numéro unique cache une histoire très personnelle : une petite poupée de porcelaine fragile et mécanique semble se libérer sans parole des carcans sociétaux pour exploser et devenir une femme qui assume pleinement sa se(x)nsualité.

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PORTRAIT – Dans l’antre animalesque de la Ménagerie avec Damien Poinsard

La Ménagerie Damien Poinsard

Damien, Lucie, Marjorie et la girafe dans les bureaux de la Ménagerie – Salondetheberlinois.com

„Hop hop hop, on peigne pas la girafe !“

Francophones de Berlin, si vous possédez l’art de manier le verbe avec brio, que vous avez une soif inextinguible de vous exprimer sur scène et de jouer la comédie, je vous souhaite la bienvenue dans l’antre de La Ménagerie ! Selon la légende, cette association de théâtre aurait été créée par un petit groupe de comédiens décidés à refaire le monde, un soir, autour d’un verre dans un bar berlinois. Aujourd’hui, La Ménagerie est devenue une véritable référence dans le milieu franco-berlinois : organisation de matchs d’impro franco-allemands, ateliers de kamishibaï, workshops de théâtre et projets pédagogiques font partie du programme varié et condensé proposé par l’asso’. Pour avoir déjà participé à un cours d’impro, je ne peux que recommander d’aller y fourrer vos naseaux pour découvrir le monde imaginaire et complexe du théâtre et explorer divers genres tels que l’absurde, le comique ou la tragédie.

Pour l’occasion, j’ai rencontré le président de la Ménagerie, Damien Poinsard, dans le petit café du Theater Haus Mitte, pour une conversation des plus vivantes et intéressantes. Originaire de Franche-Comté et comédien de profession, il prend son premier cours de théâtre en Terminale puis enchaîne les cours, formations et ateliers. Véritable enfant terrible, toujours en mouvement, toujours un projet en cours et des idées plein la tête, il déménage à Paris et exerce son premier emploi qui consiste à faire apprendre la grammaire française à travers le théâtre en milieu scolaire. Il crée ensuite sa première compagnie „loufoque et décalée“ : Isn’t It.

De la scène parisienne à la scène berlinoise

La Ménagerie

L’antre des fauves – Salondetheberlinois.com

„La scène berlinoise est très cash et provocatrice alors que le théâtre parisien est plus fin, plus suggéré.“

Il débarque alors à Berlin avec dans l’idée de repartir de 0 et d’arrêter le théâtre pour ouvrir un bar. Et pourtant, le destin le rattrape inexorablement : en 2009, il lit une petite annonce pour participer à un spectacle et rencontre par ce biais un membre de la Ménagerie qui le mène de nouveau vers sa passion première : le théâtre. Aujourd’hui, en tant que président de la Ménagerie, il s’occupe notamment de la paperasserie administrative et des embauches, mais il donne aussi le cours du mercredi soir „En Scène !“. Il est également metteur en scène et directeur de l’entreprise „Cours et Jardins“, un projet pédagogique qui propose des formations et ateliers périscolaires pour apprendre le français à travers le théâtre.

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PORTRAIT – Carmen, comédienne et créatrice de soirées stand-up

Carmen Stand Up Comedy Berlin

Carmen – Salondetheberlinois.com

„Quand je veux être drôle, je m’exprime en anglais, pour exprimer des sentiments, je parle en français et pour être à l’aise, j’opte pour l’arabe, le français ou l’anglais.“

Carmen est une jeune femme polyglotte, passionnée et pétillante que j’ai rencontrée autour d’un café après avoir vu deux de ses shows de stand-up qu’elle modérait et organisait avec la participation de comédiens de talent. Le stand-up, one man show très populaire et apprécié de la scène artistique berlinoise, c’est l’art de faire rire les gens avec beaucoup d’autodérision. Chaque artiste a environ 10-15 minutes pour s’exprimer seul sur scène et faire ses preuves devant un public très interactif. Généralement, l’entrée d’un spectacle s’effectue sur donation et tu profites d’une Vokü (équivalent de la soupe populaire), concept communautaire très en vogue à Berlin. Pour y avoir participé en tant que spectatrice, je trouve que l’ambiance est bon enfant et familiale, qu’on se marre bien et qu’on repart avec le coeur léger. Le rire, c’est bon pour le moral !

Carmen est originaire du Liban et vit depuis quatre ans maintenant à Berlin. Elle partage sa vie entre son boulot d’ingénieur au sein d’un grand groupe allemand, le théâtre et les shows. Par ailleurs, elle maîtrise quatre langues, apprises à l’école mais aussi lors de ses nombreux voyages : l’arabe (sa langue maternelle), le français, l’anglais et l’allemand. Aujourd’hui, elle organise ou co-organise , parfois bénévolement, des shows de stand-up au Vetomat, collectif engagé qui développe et promeut les projets artistiques, ainsi qu’à Teepee Land, un lieu communautaire très particulier de Berlin où les gens vivent à contre-courant de la société actuelle.

vetomat stand up comedy

Le Vetomat – @Carmen

Ses premiers pas comme showwoman à Berlin

Son parcours scientifique ne la prédestinait pas à la scène artistique et pourtant, elle avait besoin de trouver une activité afin de casser la routine quotidienne et de rencontrer du monde : elle jette alors son dévolu sur le théâtre il y a tout juste trois ans à la Ménagerie qui propose divers workshops et ateliers francophones de théâtre et d’improvisation. Carmen se produit d’ailleurs de temps en temps sur scène, en français. On a pu la voir dernièrement dans la pièce de théâtre J’étais dans ma maison et j’attendais que la pluie vienne.

Lorsqu’elle est arrivée à Berlin, elle passait ses soirées à aller voir tous les shows de stand-up de la métropole. Peu à peu elle a commencé à prendre des cours, à participer à des workshops (dont un à New York), puis à écrire des petits sketchs et à faire ses premières scènes. Il y a un an, elle créait Comedy auf Deuglish (en anglais et en allemand) au Vetomat, petit bar situé au cœur de Friedrichshain. Par la suite, Oliver Charles Gurr lui propose d’organiser un second show à Teepee Land (au milieu des tipis !!!), devenu l’un des lieux de prédilection des comédiens, notamment grâce à son atmosphère hors du temps, surréaliste et un peu magique. En coopération avec Alex Upatov , modérateur du show ainsi qu’Oliver Charles Gurr, ils créent ainsi TeepeeLand Stands Up. Aujourd’hui, les shows rencontrent un succès phénoménal : autant de comédiens professionnels que de comédiens amateurs se produisent sur les petites scènes du Vetomat et de Teepeeland.

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